mercredi 27 juillet 2011

Uriah Heep - Firefly


Encore un album de Uriah Heep! Oui, ce groupe génial a eu une histoire tellement mouvementée, des line-ups tellement instables, qu'il est vraiment intéressant d'en étudier toutes les facettes. Cette fois, on va se pencher non pas sur la période Peter Goalby ou sur celle, plus mythique, où David Byron officiait en tant que vocaliste.
Firefly, publié en 1977, était le premier album enregistré avec le chanteur John Lawton, un illustre inconnu, du moins à l'époque.Et pour une première, il faut bien reconnaître qu'il a fait plus que bien assurer.

Imaginez donc remplacer un chanteur brillant dans un groupe au faîte de sa gloire, être en concurrence pour remplacer ledit chanteur par des professionnels confirmés tels David Coverdale, entre autres. Fallait avoir une sacrée paire de cojones pour ne pas être mort de trouille.Et John Lawton l'a fait, sans sourciller. Et bien en plus, car on ne devine pas à l'écoute de Firefly qu'il faisait ses premiers pas en tant que frontman du Heep.

Du point de la musique: on reste en terrain connu, ce n'est pas là que se trouve les nouveautés. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il s'agit de redite, mais on a bien du mal à trouver des éléments qui prendraient l'auditeur par surprise. Ceci étant, des titres comme Been away too long, Wise man, The hanging man ou Do you know sont de fort bonne facture. Normal, on est habitué et on n'en attendait pas moins de Mick Box et de sa bande. Difficile effectivement de retrouver à redire: tous les éléments qui ont fait la gloire du groupe sont là. Le chant de Lawton, certes moins épique que celui de son prédécesseur, ne souffre d'aucun reproche, le talent de songwriter de Ken Hensley est intact, le guitariste Mick Box assure grave (réécoutez le solo de Been away too long, vous me comprendrez), la production, aux petits oignons, n'a pas trop non plus subi les outrages du temps.

Bon, on peut chipoter sur quelques titres un plus faibles: Who needs me, signé par le batteur Lee Kerslake (futur Ozzy Osbourne) souffre sans doute de succéder au génial Been away too long, Rollin' on et Sympathy ne sont pas mal mais restent foncièrement dispensables. Le bouquet final, Firefly, ne démérite pas non plus, mais il a par moments du mal à décoller. Rien de mauvais là-dedans, beaucoup de groupes moyens s'en seraient contentés, mais là, il manque un je-ne-sais-quoi qui fait toute la différence avec des titres comme The magician's birthday ou Salisbury, pour ne citer que ces deux titres-là.

Sans atteindre les sommets, Firefly n'en demeure pas moins un bon album, interprété par des musiciens doués et compétents qui n'ont plus grand chose à prouver, si ce n'est qu'ils pouvaient continuer avec un autre chanteur que David Byron. Beaucoup d'observateurs en ont été pour leurs frais, car John Lawton délivre ici une prestation de premier choix. Un bon chanteur sur lequel il fallait compter, d'autant plus qu'il était nettement moins problématique à gérer que Byron et ses soucis d'alcoolisme. Le seul reproche qu'on puisse faire, c'est éventuellement un manque d'innovation, mais cela est largement insuffisant pour faire baisser la qualité intrinsèque de ce disque.

Malheureusement, la qualité ne sera plus forcément au rendez-vous pendant un moment, en raison des changements incessants de personnels et des traditionnelles frictions et divergences musicales. C'est pourquoi il convient de profiter d'un disque où l'on sent que ses géniteurs ont pris du plaisir à l'écrire.

mercredi 13 juillet 2011

Vulcain - Big Brothers


Desperados, sorti en 1985,m'avait laissé une bonne impression. Sans être original, Vulcain savait être efficace et avait à ce titre rien à envier à ses maîtres à penser, Motorhead. Déjà pas mal pour un groupe français. A l'époque, à part Trust, pas grand-chose de folichon sur la planète rock française (même si Blasphème ou Satan Jokers essayaient de surnager sans grand succès). Big brothers, publié en 1986, se devait de confirmer que Desperados n'était pas qu'un coup de chance. Pari à moitié réussi.

Rien qu'à la pochette, on pouvait se douter que quelque chose allait clocher. La pochette, bien ancrée dans les années 80, montrait le groupe avec des personnes masquées singeant Mitterrand, Reagan, Thatcher et Gorbatchev. Mouais, ça le fait moyen, ce type de pochette au style bien franco-français. J'ai eu peur d'avoir une leçon de géopolitique, mais le groupe n'aborde pas trop ce type de sujet (sauf sur Khadafi et Le $oviet suprême.

Dès les premières notes, on comprend que la production, signée Elie Banali, a été calibrée pour tenter de séduire un public plus large. On ne peut pas dire que la musique du groupe s'est ramollie, mais il est clair que l'on a tenté d'ôter les aspérités qui faisaient le charme des albums précédents.

On trouve ici de tout: des titres mid tempo vraiment intéressants tels Khadafi, Le $oviet suprême, Faire du rock ou 22, du très bon hard survitaminé que n'aurait certainement pas renié Motorhead, avec Les plaisirs solitaires et Grand prix. Excellents en tous points, ces titres auraient mérité de faire de Vulcain un plus grand groupe qu'il ne l'a été et en faire l'équivalent de Trust. Les musiciens du groupe avaient en tous cas le potentiel, que ce soit au niveau de la technique musicale (Daniel Puzio est un fin guitariste, Marc Varez, lorsqu'il se décide à utiliser la double pédale, donne un gros coup de boost à l'ensemble, et il n'a absolument rien à envier aux plus grands batteurs de hard rock).

Là où je coince plus, c'est sur les bluesy Drôles de jeux (passe encore) mais surtout sur le trop long Jeudi 19 juin, qui traite de la mort de Coluche (un thème bien franco-français, même si j'apprécie l'humoriste génial qu'il était). Mais là où je ne comprends pas du tout où le groupe a voulu en venir, c'est avec la reprise de On nous cache tout on nous dit rien de Jacques Dutronc (rien à voir Dutroux, je vous vois venir!) et avec la paillarde Marylou, où le groupe sort même les banjos. Qu'est-ce que ça vient foutre ici? Je ne vois vraiment pas l'intérêt, si ce n'est faire passer le groupe pour des bons gros franchouillards enclins à la déconne. C'est le genre d'image qui suivra à la trace nombre de groupes français qui leur succèderont...

Alors que je n'avais pas (ou peu) trouvé de moment faible sur Desperados, Big brothers, de par sa volonté de fédérer un public rock plus large, se perd en route. Heureusement que plus de la moitié de l'album tienne la route, sinon, c'eût été un gâchis monumental.

Le leader de Sodom, Tom Angelripper, déclarait récemment à la presse qu'il était un grand fan de Vulcain. Etant donné la passion de celui-ci pour Motorhead, il était évident que Vulcain ne pouvait que lui plaire. Cantonner Vulcain à un rôle de clone de Motorhead serait toutefois réducteur: malgré les tentatives foireuses de se diversifier, Vulcain a sa propre personnalité et à eu au moins le mérite de se faire un nom alors que nombre de groupes français galéraient pour un succès bien inférieur. Vulcain est injustement tombé par la suite dans l'oubli mais je vous conseille vivement d'y poser une oreille, vous pourriez être bien surpris de voir ce que peuvent faire des musiciens rock français quand ils se décident de se bouger.

mercredi 6 juillet 2011

Santana - Moonflower


Cela faisait un bon moment que je n'avais plus évoqué en ces lignes ce bon vieux Carlos Santana. Etant donné que nous nous trouvons en période estivale, le moment est bien choisi pour corriger le tir. Avec sa fusion de rock, de rythmes latino, de jazz, de funk, Santana avait su s'attirer la sympathie des foules, à juste titre d'ailleurs. Santana (le groupe) a effectivement pondu d'excellents albums au cours des 70's, tels Caravanserai ou Abraxas. Mais ce Moonflower paru en 1977, peut-être un peu moins connu que ses prédécesseurs, recèle de petites pépites qui font de lui un incontournable dans la discographie de Santana.

Ce disque a d'ailleurs un concept pour le moins curieux: mélanger titres inédits studio et titres enregistrés en public. L'idée qui semblait à l'époque quelque peu farfelue s'est avérée très intéressante. A vrai dire, l'enchaînement a été parfaitement réalisé et cela ne choque aucunement l'oreille.

Il faut bien dire aussi que la qualité des titres, de haute volée, aide à la bonne mise en place du concept. Les titres live, enregistrés entre 1976 et 1977 à Munich, Colmar, Paris et Londres montrent un groupe au sommet de son art. La prise de son est parfaite: le son est cristallin, pur, ce qui ne gâche rien. On profite bien sûr des grands classiques du groupe: Carnaval, Black magic woman, Europa, Soul sacrifice, déjà excellents en studio, s'avèrent littéralement impériaux lorsqu'ils sont interprétés devant un public. Et Carlos Santana, dont le touché de guitare est unique, s'impose avec facilité comme maître de cérémonie, le tout devant une audience quasi-conquise d'avance. Le seul point noir, c'est la présence de Head, Hands and feet, un solo de batterie: autant dire un exercice qui n'apporte rien, si ce n'est de l'ennui. Vite, on zappe!

Concernant les inédits, là aussi, pas grand-chose à redire: il y en a pour tous les goûts: du funk avec Zulu, des rythmes latino avec Flor d'luna, du bon vieux rock sauce Santana avec la reprise de She's not there (des Zombies, groupe de rock anglais des 60's), tous les citer ne servirait finalement à rien car il n'y a pas vraiment à redire: le père Santana ne se fiche pas de nous: les titres sont toujours aussi bons, variés et efficaces. Une bonne incitation à boire des verres de mescal, en regardant le soleil couchant, quelque part sur une plage d'Acapulco ou de Veracruz. C'est cela la force de la musique de Santana, réussir à faire voyager l'auditeur sans que celui-ci n'ait à bouger son cul de son canapé!

Carlos Santana a en plus la chance d'être bien entouré: il faut bien reconnaître que sans des musiciens aussi talentueux que Greg Walker (chant), Graham Lear (batterie), Tom Coster (claviers) ou David Margen (basse), jamais il n'aurait pu faire aussi bien. Ils méritaient bien d'être cités, eux qui ont toujours été en retrait par rapport à leur leader Carlos Santana.

Ce millésime 1977 était incontestablement un grand cru pour Santana, moins coté que ses illustres prédécesseurs, mais il n'y a franchement aucune raison à cela. Je préfère par exemple de très loin ce Moonflower que des albums tels que Amigos (1976) ou Borboletta (1974). Avoir mélangé des titres live à des titres studio a rendu l'ensemble plus dynamique et il n'y a plus de temps mort.

Moonflower prouve encore une fois que lorsque le rock ose s'acoquiner avec d'autres styles, et que cela est fait avec talent, le résultat peut s'avérer tout simplement excellent. Du grand art, à déguster sans modération!